Au Burkina Faso, depuis le 1er janvier 2020, les attaques commises par des militants contre les civils et les autorités locales forcent chaque jour des centaines de personnes à fuir leur foyer en quête de sécurité. A la date du 21 février 2020, on compte 765 000 déplacés internes dont plus de 700 000 d’entre eux qui le sont devenus ces derniers mois, selon le Haut commissariat pour les réfugiés (HCR).
Selon le rapport MSA du 19 au 22 décembre 2019, le nombre total de personnes déplacés internes dans la ville de Dori située dans la région du Sahel est estimé à environ 33 808 personnes. Les personnes qui ont fui les violences font état d’attaques contre leurs villages menées par des groupes de militants ; de meurtres ; de viols et de pillages. Terrifiés par ces attaques, les habitants abandonnent toutes leurs possessions derrière eux, avant de fuir en hâte vers des lieux plus sûrs. La situation humanitaire s’est fortement détériorée au cours de ces dernières années dans le Sahel.
Alaye Soudré (cultivateur) s’est vu contraint de quitter Gorgadji depuis janvier 2020 pour se retrouver dans la ville de Dori où il est désormais réfugié interne avec une famille de 10 personnes. « Comme c’est le chef de famille seulement qui est recensé, c’est une seule personne qui bénéficie de l’aide humanitaire que nous donne le Programme alimentaire mondial. » Mais l’une des difficultés que rencontre ce père de famille est qu’il ne peut recevoir d’aide que du PAM. Selon M. Soudré, les autres organismes refuseraient de leur venir en aide dès lors qu’ils ont été enregistrés par le PAM. Pour subvenir à sa pitance quotidienne, Alaye Soudré (sans formation de base), s’est transformé en réparateur de portables. Lui qui désormais, confie son sort à Dieu.
Ousmane Kafando lui, est désormais aide maçon. Lui qui les années antérieures, pouvait compter des centaines de milles comme revenu issus de la vente de bétails et autres cultures. Marié et père de 7 enfants, il a à sa charge, un frère qui lui aussi, a dû abandonner tout derrière lui à Gorgadji depuis janvier 2020. Alaye Soudré et Ousmane Kafando affirment que face aux cas de maladie, ils n’ont d’alternatifs que de confier leur sort à Dieu et aux bonnes volontés.
Les Blocs 1, 2, 3 et 4, les sites les mieux organisés
Bourahima Zoré est le responsable des déplacés internes du bloc 1 situé au quartier Petit Paris de Dori. Il a lui également, dû fuir et tout laisser derrière-lui à Raogho dans la commune de Tensa depuis fin 2019 pour se retrouver à Dori. Dans ce bloc 1 qui compte plus de 1500 déplacés internes, les conditions de vie sont plus ou moins caméristes. A noter que le quartier Petit Paris compte 4 blocs.
Père d’une famille de 7 personnes dont 4 enfants, Bourahima Zoré explique que les ménages inscrits perçoivent la somme de 200.000 FCFA pour la construction d’une maison. L’ONG OXFAM elle, fait construire une toilette par ménage. D’autres organismes tels que l’ONG Développement, Expertise et Solidarité Internationale (DESI) leur octroi un sac de mil et sorgho et la somme de 52.000 FCFA tous les deux mois pour les condiments. Le PAM également leur vient en aide avec la somme de 1250 FCFA par personne.
L’ONG Save the children quant à elle, donne 4 chèvres ou moutons à chaque ménage (une seule fois). Pour ce qui concerne la prise en charge sanitaire, M. Zoré explique : « lorsque quelqu’un est malade, il se rend à la Direction de l’Action sociale qui lui donne un ticket. C’est avec ce ticket que le malade se rend au centre de santé pour sa prise en charge gratuite. » Il précise tout de même que le nombre de personne prises en charges par jour est limité à 50.
Dans ce bloc 1, l’ONG Alliance Technique d’Assistance au Développement (ATAD) a fait construire une école (même si pour l’instant, elle sous paillote). Toutefois, Bourahima Zoré fait remarquer que des difficultés demeures. Notamment le manque de nouvelles terres cultivables peut être source de chômage et qui risque de créer d’autres phénomènes. Il invite donc les différents organismes et l’Etat burkinabè à se pencher davantage sur la situation précaire des déplacés internes.
L’hospitalité légendaire des communautés d’accueil
Tous sont unanime sur L’hospitalité légendaire des communautés d’accueil. C’est du moins ce qui ressort des propos des quelques déplacés internes rencontrés dans le cadre de ce reportage : « Il faut dire franchement que nous n’avons aucun souci avec les populations d’ici. Depuis notre arrivée jusqu’à ce jour, tout se passe bien et nous nous sentons comme chez nous à part les besoins primaires des ménages », témoigne Bourahima Zoré.
Partout au Sahel, les survivants des attaques, qu’ils aient été forcés de fuir à l’intérieur du pays ou qu’ils soient devenus des déplacés, ont besoin de sécurité, d’abris, de nourriture et d’eau. Par ailleurs, des vêtements et d’autres articles de première nécessité, y compris des trousses d’hygiène pour les femmes et les jeunes filles, sont nécessaires d’urgence. Il faut également accorder la priorité à l’accès à des installations sanitaires et aux soins de santé, y compris un soutien psychosocial pour les personnes qui ont fui ou qui ont été témoins d’atrocités. Cette aide doit également s’adresser aux communautés d’accueil, qui sont souvent les premières à réagir alors qu’elles sont elles-mêmes démunies.
Dan Deedat Dicko (correspondant à Dori)