Cette réflexion émane de Bertille Minoungou Juriste publiciste de formation, Bertille exerce depuis 2 ans dans l’Humanitaire, Blogueuse et sensible à la question des femmes, dans cet article partagé avec notre rédaction , elle porte un regard sur la problématique de la représentation des femmes à la gouvernance locale au Burkina Faso.

Femmes et gouvernance locale »
Le Burkina Faso compte plus de 51,7% de femmes. Malgré cette majorité féminine, celles-ci ont une faible représentativité en matière de gouvernance locale. Le pays des hommes intègres faut il le rappeler a adopté dans son élan démocratique la politique de la décentralisation à travers la loi N°55.2004/AN portant Code Général des Collectivités Territoriales (CGCT) adoptée en 2004. Cette loi a permis de mettre en place des communes et urbaines qui sont gérées par des élus locaux sur toute l’étendue du territoire national.
Que faut-il entendre par décentralisation?
La décentralisation est le fait de donner le pouvoir aux populations d’organiser et de conduire leur propre développement à travers des organes élus au niveau des communes. Il s’agit de créer des conditions pour une participation directe des citoyens à la prise de décisions au niveau local. Elle vise à rendre les populations, acteurs de leur propre développement, car la décentralisation veut dire aussi que l’État cède une partie de ses pouvoirs et de ses tâches ou attributions à des structures légales créées à la base. La participation à la gestion des affaires publiques intéresse tout le monde, les hommes aussi bien que les femmes. La déclaration universelle des droits de l’homme le rappelle à son article 21 en ses termes : “Toute personne a le droit de prendre part à la direction des affaires publiques de son pays, soit directement, soit par l’intermédiaire de représentants librement choisis. Toute personne a droit à accéder, dans des conditions d’égalité, aux fonctions publiques de son pays…”.
La Charte africaine des droits de l’homme et des peuples, adoptée en 1981 renchérit en affirmant le principe de l’égal accès à la direction des affaires publiques. Nonobstant ces conventions auxquelles le Burkina a ratifié, il est à noter que le taux de femmes participant à la gouvernance locale est très minime par rapport à celui des hommes. En mai 2016, on comptait seulement 10 femmes maires sur 351 mairies (arrondissements y compris) soit un taux de 2,85%. Sur 1057 conseillers municipaux, les femmes ne représentent que 8,04% et les hommes 91,96%. Quant aux femmes maires réélues, le pourcentage est de 2,41% contre 97, 59% d’hommes. Ces chiffres laissent transparaître le manque de confiance accordée aux femmes pour ce qui est de la gestion du pouvoir public. Qu’est ce qui pourrait justifier une telle disparité ? Les stéréotypes socio-culturels freinent la participation des femmes à la gouvernance locale au Burkina Faso. En effet, la femme est le plus souvent perçue comme un être inférieur à l’homme. De nombreuses femmes elles-mêmes sont persuadées qu’elles n’ont pas le droit de participer à la prise de décision publique et se conforment à des « vertus » telles que l’obéissance et la soumission. La sphère politique est largement perçue comme le domaine réservé de l’homme. D’autant plus, que des idées telles que “une femme qui fait de la politique ne peut pas tenir un foyer” se font beaucoup entendre, ce qui entraine plusieurs femmes à ne pas s’intéresser à la gouvernance. De telles idées préconçues alimentent le manque de confiance
et d’assurance chez beaucoup de femmes.

Le mode de fonctionnement des partis politiques ne favorise pas les femmes, car lors delà composition des listes électorales les femmes sont reléguées en dernière position. Ce positionnement des femmes ne leur donne pas de chance d’être élues. En outre, le code électoral burkinabè ne prévoit pas de candidatures indépendantes, il faut obtenir l’investiture d’un parti. Dans ce cadre, les femmes font face aux attitudes patriarcales défavorisâtes. C’est le cas pour une femme mariée qui ne peut pas se présenter dans sa province d’origine. Juste parce qu’elle s’est mariée et est considérée comme n’appartenant plus à sa province d’origine. Le comble c’est qu’elle ne pourra pas non plus se présenter dans la province de son époux car elle y sera considérée comme une étrangère.
Cette situation empiète considérablement le droit des femmes à prendre part aux affaires publiques de l’Etat tel que lui reconnaissent les instruments internationaux. Par la même occasion, un droit intrinsèque à la personne humaine est violé il s’agit du droit à l’égalité de tous devant la loi. Comme le rappelle la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples adoptée en 1981 à travers son article Au vu de la faible participation féminine à la gouvernance locale, les femmes doivent se mobiliser pour encourager toutes initiatives entrant dans le cadre de la promotion des droits de la femme. La promotion du leadership féminin est un bon début pour donner envie aux jeunes filles de s’intéresser et de s’impliquer aux actions de gouvernance locale. Pour parvenir à des résultats concluants, une implication de tous les acteurs du processus démocratique doit être requise à commencer par celle des hommes car ce sont des acteurs clés de ce processus. »
Bertille Minoungou